SOS Méditerranée : les collectivités territoriales peuvent accorder, sous conditions, une subvention à une action humanitaire internationale

Décision de justice
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Saisi de l’octroi par des collectivités territoriales de trois subventions à l’association SOS Méditerranée, le Conseil d’État rappelle aujourd’hui que la loi permet aux collectivités territoriales de soutenir toute action internationale d’aide humanitaire qui respecte les engagements internationaux de la France et n’interfère pas avec la politique internationale conduite par l’État. Les collectivités territoriales ne sauraient toutefois, en apportant un tel soutien, prendre parti dans un conflit de nature politique, et elles doivent toujours s’assurer que leurs subventions financent uniquement des activités réellement humanitaires, et non des activités politiques. Le Conseil d’État juge que les subventions de la Ville de Paris et du département de l’Hérault à SOS Méditerranée sont conformes à la loi, mais annule la subvention accordée par la Ville de Montpellier, qu’il juge insuffisamment ciblée.

Des particuliers ont saisi la justice administrative pour contester des subventions accordées par la Ville de Paris, la Ville de Montpellier et le département de l’Hérault à l’association SOS Méditerranée, qui mène une activité de sauvetage en mer de migrants dans les eaux internationales. Après de premières décisions de tribunaux administratifs et de cours administratives d’appel, le Conseil d’État se prononce aujourd’hui sur ces trois subventions.

Un soutien réservé au financement d’une activité internationale de coopération, d’aide au développement ou à caractère humanitaire, à l’exclusion d’activités politiques, et soumis à la condition de respecter les engagements internationaux de la France

Le Conseil d’État rappelle que le Parlement a permis aux collectivités territoriales de mettre en œuvre ou soutenir toute action internationale de coopération, d’aide au développement ou à caractère humanitaire, sans que cette action n’ait à répondre à un intérêt public local, à s’inscrire dans les autres domaines de compétences des collectivités territoriales ou à impliquer une autorité locale étrangère.

Ces actions doivent aux termes de la loi respecter les engagements internationaux de la France. Elles ne doivent pas interférer avec la conduite par l’État des relations internationales de la France. Enfin, ces actions ne peuvent pas conduire une collectivité territoriale à prendre parti dans un conflit de nature politique. Dès lors, si le simple fait qu’une organisation prenne des positions dans le débat public n’interdit pas à une collectivité territoriale de lui accorder un soutien pour une action internationale de coopération, d’aide au développement ou à caractère humanitaire, c’est à la condition que cette action ne constitue pas en réalité une action à caractère politique et que la collectivité territoriale qui décide d’apporter son soutien à une telle organisation s’assure que son aide sera exclusivement destinée au financement d’une action de coopération, d’aide au développement ou à caractère humanitaire, et ne sera pas utilisée pour financer les autres activités de cette organisation.

Une collectivité territoriale peut légalement apporter un soutien financier à SOS Méditerranée pour son action humanitaire de sauvetage en mer

Le Conseil d’État juge que l’activité de sauvetage en mer de SOS Méditerranée est bien une action internationale à caractère humanitaire, et non une action de nature politique. Il relève qu’elle est menée en conformité avec les principes du droit maritime international, qui prévoient l’obligation de secourir les personnes se trouvant en détresse en mer, et de les débarquer dans un lieu sûr dans un délai raisonnable, quel que soit leur nationalité ou leur statut, et juge qu’elle n’est pas contraire aux engagements internationaux de la France. Il relève également que si les autorités de certains États de l’Union européenne ont pu refuser le débarquement des navires de l’association, celle-ci y a déféré, et que les autorités françaises ont d’ailleurs contesté la conformité de ces refus au droit maritime international, et juge que, dans ces conditions, cette activité ne peut être regardée comme interférant avec la conduite par l’État des relations internationales de la France.  

Les conditions de fond ainsi posées par la loi étant remplies, le Conseil d’État en déduit que le fait que les responsables de SOS Méditerranée ont pris des positions dans le débat public sur la politique de l’Union européenne et de certains États en matière de sauvetage en mer des migrants en Méditerranée ne suffit pas à interdire aux collectivités territoriales d’apporter un soutien à son activité opérationnelle de sauvetage en mer, à condition de réserver ce soutien à cette seule activité.

Deux subventions conformes à l’ensemble des conditions de fond et de forme exigées par la loi

Le Conseil d’État relève que la subvention de 100 000 euros accordée par la Ville de Paris est exclusivement destinée à financer l’affrètement d’un nouveau navire en vue de permettre à l’association de reprendre ses activités de secours en mer et que la convention conclue avec SOS Méditerranée prévoit  que l’utilisation de la subvention à d’autres fins que l’activité de sauvetage en mer entraîne la restitution de tout ou partie des sommes déjà versées et que la Ville de Paris peut effectuer des contrôles, y compris sur pièces et sur place, pour s’assurer du respect de ces obligations. Le Conseil d’État en déduit que la destination de ce soutien est donc suffisamment encadrée.

Le Conseil d’État rejette également le recours contre la subvention de 20 000 euros du département de l’Hérault accordée à SOS Méditerranée.

Une subvention accordée par la commune de Montpellier annulée car insuffisamment ciblée

En revanche, le Conseil d’État annule la décision de la commune de Montpellier d’accorder une subvention de 15 000 euros à SOS Méditerranée. Il relève qu’aucun élément ne permet d’établir que la commune se serait assurée que son aide serait exclusivement destinée au financement de l’action internationale humanitaire qu’elle entendait soutenir. En effet, la délibération du conseil municipal ne précise pas la destination de cette subvention et la convention signée avec l’association indique qu’elle a été sollicitée pour le fonctionnement de l’association, sans plus de précisions.

 

 

Lire les décisions :

- Ville de Paris

- Département de l’Hérault

- Ville de Montpellier

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